La somme des comportements individuels suffit-elle à faire changer les systèmes ?
Cette question centrale est issue d’un chapitre passionnant de Nicolas Bricas « Le consom’acteur, moteur du changement ? », lui-même issu de l’ouvrage « Une écologie de l’alimentation » aux éditions Quae.
Il me semble important de mentionner que ce chapitre permet de revenir sur une fausse croyance qui a la peau dure : l’éducation, l’information et la sensibilisation des consommateurs suffisent pour modifier les comportements.
Nicolas Bricas prend un exemple très simple et très parlant pour déconstruire cette croyance : « il ne suffit pas d’expliquer aux individus que le vélo est bon pour la santé et l’environnement (installation mentale) pour qu’ils utilisent ce mode de déplacement. Presque tous en sont déjà probablement convaincus. Il faut aménager des pistes cyclables ou des parcs à vélo sécurisés, et se déplacer en vélo doit devenir la norme sociale et la voiture l’exception si ce n’est l’anomalie ».
Comme l’a monté Saadi Lahlou dans son ouvrage « Installation theory: the societal construction and regulation of behaviour », les comportements sont, malgré toutes les meilleures volontés du monde (installations mentales), contraints par l’environnement matériel (les installations physiques) et social (les installations sociales).
Ayant rappelé cela, on serait tenté de penser que l’article nous amène à un « oui mais ». Certes les consommateurs sont souverains et peuvent agir au travers de leurs choix de consommation et leurs pratiques. Mais cette responsabilité individuelle a des limites, dont les principales sont listées dans l’article.
Si l’article décrit bien ce « oui mais », la conclusion ouvre sur un changement de paradigme. Nicolas Bricas nous rappelle que « voter avec son porte-monnaie » est au final une réaction à un système existant dans lequel les consommateurs ne sont pas parties-prenantes.
Il termine en nous posant cette question « Ne faut-il pas repenser la définition des systèmes alimentaires pour permettre aux citoyens de participer à la définition de l’alimentation qu’ils souhaitent ? ».
Sortir d’un système où l’État sensibilise les consommateurs et où les entreprises repèrent « les attentes des consommateurs » pour « répondre à la demande » pour créer « des espaces où s’élaborent des propositions citoyennes négociées avec des acteurs publics et privés pour orienter l’offre alimentaire, construire des paysages alimentaires, définir des politiques de solidarité et des chemins de transition vers des systèmes durables ».
Quelles réactions avez-vous à la lecture de cet article en tant que consommateur ? En tant qu’entreprise ?
Diplômée de l’Ecole d’Ingénieur AgroParisTech avec deux spécialisations en cinquième et sixième année : innovation et développement de produits alimentaires et nutrition-santé. Diplômée de l’Université Toulouse Jean Jaurès d’un Master 2 en Sciences Sociales Appliquées à l’Alimentation. Forte de 14 ans d’expériences dans un grand groupe Agroalimentaire du CAC40, Charlotte Sarrat souhaite particulièrement s’investir auprès d’entreprises porteuses de projets innovants « pour nourrir demain ». Plus d’informations sur www.linkedin.com