Les influenceurs et célébrités ne se contentent plus de promouvoir des produits alimentaires, ils créent désormais les leurs.
Après les marques nationales des industriels (marques propres) puis les marques de distributeurs (MDD) des enseignes, voici venu le temps des marques d’influence (MDI), un concept récent introduit par Pour nourrir demain pour décrire ces nouvelles marques lancées par des personnalités influentes.
Des youtubeurs aux chanteurs, en passant par les sportifs et acteurs, de plus en plus de figures médiatiques transforment leur popularité en marques alimentaires à part entière.
Du placement de produit à la création de produits
Jusqu’à récemment, la relation entre les influenceurs et l’agroalimentaire se limitait souvent aux placements de produits et collaborations publicitaires.
Désormais, la tendance s’inverse : les influenceurs passent de l’autre côté du comptoir et développent leurs propres produits.
Ils capitalisent sur la confiance de leur communauté pour proposer des aliments ou boissons alignés avec leurs valeurs et l’image qu’ils véhiculent.
Ce mouvement s’inscrit dans la lignée des personnalités qui, depuis des années, profitaient de leur notoriété pour ouvrir des restaurants ou lancer des cuvées de vin.
La nouveauté, c’est son ampleur et son caractère natif digital : des youtubeurs ou instagrammeurs qui mobilisent des millions de fans peuvent désormais propulser instantanément leur marque du virtuel aux rayons des magasins.
Plusieurs facteurs expliquent l’essor de ces MDI
D’une part, les facilités de fabrication en marque blanche offrent des raccourcis : un influenceur peut s’associer à un fabricant existant pour développer sa recette.
Par exemple, les pizzas surgelées Delamama lancées par le youtubeur humoriste Mister V sont produites par un grand groupe allemand (Freiberger), également derrière la gamme quasi identique d’un rappeur outre-Rhin.
D’autre part, la distribution s’adapte :l’intérêt des enseignes pour ces produits « tendance » permettent aux marques d’influence de trouver rapidement leur public.
Enfin, l’influenceur apporte un storytelling et une communauté déjà acquise, ce qui donne à ces produits un capital sympathie et une viralité immédiate.
On l’a vu avec la boisson Prime des youtubeurs Logan Paul et KSI, dont la sortie a provoqué des foules de fans se ruant en magasin pour une bouteille.
Autrement dit, les MDI combinent le meilleur des deux mondes : l’expertise industrielle traditionnelle et la puissance de feu médiatique des stars du web.
Des influenceurs français qui investissent les rayons
La France n’échappe pas à la vague des marques d’influence, avec plusieurs exemples marquants ces dernières années. Le youtubeur aux 19,5 millions d’abonnés Squeezie s’est lancé en 2025 dans l’aventure des boissons santé en dévoilant sa propre gamme de kombuchas baptisée Ciao Kombucha.
Après la mode et la musique, le créateur de contenu a voulu populariser en France cette boisson fermentée bénéfique pour le microbiote. Brassée en Espagne et déclinée en six saveurs (citron, pêche, fruit du dragon, fruits rouges, menthe, gingembre-hibiscus), Ciao Kombucha est présentée comme « faible en sucre » et composée d’ingrédients naturels.
Squeezie espère ainsi convertir son jeune public à une alternative plus saine aux sodas, en misant sur un positionnement fun et « décalé » à l’image de son univers.
Il a ainsi engrangé 2,65 M€ de chiffre d’affaires en quelques mois seulement après son lancement en grande distribution.
Autre registre, autre succès : le duo de rappeurs Bigflo & Oli a, lui, investi le rayon des softs avec Matécito, une boisson pétillante au maté inspirée de leurs origines argentines.
Lancée initialement en Occitanie, Matécito a rapidement dépassé le stade local pour arriver à l’échelle nationale.
À partir d’août 2025, cette infusion naturellement énergisante (faible en sucre, riche en antioxydants) a été référencée dans environ 400 points de vente du groupe Casino (Monoprix, Franprix, Spar, etc.)
Produite près de Toulouse, leur ville natale, la boisson se veut ancrée localement tout en surfant sur la vogue du maté. Bigflo & Oli rejoignent ainsi la liste des artistes devenus entrepreneurs food, avec un « petit maté des grandes histoires » désormais accessible en grande distribution.
En 2022, Mister V a frappé fort en co-développant avec un industriel deux pizzas surgelées Delamama inspirées d’un de ses sketches.
Pari gagné : la pizza Delamama s’est hissée parmi les meilleurs lancements de produits de grande consommation de l’année, générant 1,4 million d’euros de chiffre d’affaires en trois mois seulement.
Ces exemples illustrent la diversité des MDI made in France : boisson bien-être, soda alternatif, pizzas ludiques ou encas protéinés, tous portés par des personnalités du web ou de la musique qui apportent leur créativité et leur fanbase.
Quelles opportunités pour l’industrie agroalimentaire ?
La montée des « Marques d’Influence » (MDI) représente une opportunité inédite pour les acteurs agroalimentaires traditionnels.
Loin de saper l’industrie en place, ces marques portées par des influenceurs ouvrent de nouvelles voies de collaboration, où chacun y gagne en créativité et en impact.
En s’associant à des co-packers, des fabricants ou des logisticiens, les influenceurs peuvent transformer une idée née sur les réseaux sociaux en un produit concret, tandis que les industriels bénéficient de l’aura et de la proximité que ces créateurs entretiennent avec leur communauté.
Au cœur de ces nouvelles alliances se trouve un esprit de co-création et d’innovation permanent. Les influenceurs n’hésitent pas à s’impliquer dans la conception de leurs produits aux côtés des formulateurs : choix des saveurs, du packaging, essais de recettes… rien n’est laissé au hasard.
Pour les industriels, cela signifie accepter un processus de développement plus ouvert et interactif, où l’on co-construit le produit avec le créateur et parfois même avec sa communauté.
Dans certains cas, le public de l’influenceur est invité à participer aux décisions, en votant sur la prochaine saveur d’une boisson ou sur le design d’une étiquette, renforçant ainsi le sentiment d’appartenance autour de la marque
Au final, les MDI apparaissent comme une chance à saisir pour l’agroalimentaire.
Elles invitent les fabricants traditionnels à explorer de nouveaux modèles de collaboration et à repenser leur rapport au consommateur, en s’ouvrant à de nouveaux récits et à des temporalités plus courtes dictées par les tendances.
En embrassant cette évolution, industriels et influenceurs construisent ensemble une nouvelle proximité avec le public, une alliance agile et créative, porteuse d’innovation pour toute la filière.
Plus d’informations sur www.pour-nourrir-demain.fr