Actualité agro-alimentaire

Agriculture cellulaire : la solution pour le climat ?

L’agriculture cellulaire, avec la viande de synthèse comme produit emblématique, connaît depuis quelques années un essor considérable, grâce à des investissements massifs, à la nette diminution des coûts de production, et à l’amélioration sensible des produits en termes de propriétés organoleptiques.

Il faut dire que la perspective de produire de vraies protéines animales, sans les inconvénients de l’élevage, est en phase avec des préoccupations centrales pour les consommateurs : éthique, santé, et surtout environnement. Ce dernier aspect est régulièrement mis en avant comme l’un des bénéfices majeurs de l’agriculture cellulaire. Un atout considérable, quand on sait que l’élevage est responsable de 14,5% des émissions anthropiques de gaz à effet de serre.

Certaines voix s’élèvent néanmoins pour nuancer ces bénéfices climatiques. Eléments scientifiques à l’appui, Alcimed tente d’éclaircir le débat sur l’agriculture cellulaire.

1. Qu’est-ce que l’agriculture cellulaire et qu’est-ce que la viande de synthèse ?

L’agriculture cellulaire est une biotechnologie permettant la fabrication de produits ou d’ingrédients animaux à partir de lignées de cellules mises en culture dans des bioréacteurs, plutôt qu’à partir d’animaux vivants.

La viande de synthèse (ou viande in vitro, viande de culture, etc. – les appellations sont nombreuses !) est le produit de la prolifération de cellules souches ou de cellules musculaires non différenciées (myoblastes), dans un milieu de culture riche en oxygène, en nutriments (acides aminés, glucides, vitamines, minéraux) et en facteurs de croissance.

Les facteurs de croissance sont ensuite éliminés du milieu de culture, afin d’induire une différenciation des cellules en myotubes (fibres musculaires), mais aussi en d’autres types de cellules, précurseurs de constituants minoritaires du muscle (gras, vaisseaux sanguins, tissu conjonctif). Un biomatériau servant « d’échafaudage » aux cellules est souvent nécessaire pour servir de support aux cellules qui, en se différenciant, forment ainsi un véritable tissu musculaire dont la structure se rapproche de la viande conventionnelle.

2. Que se passe-t-il dans l’écosystème de l’agriculture cellulaire ?

Une accélération depuis 2015 de la création de start-ups autour de la viande de synthèse :

Depuis le premier « steak de synthèse » mis au point en 2013 par le Professeur Mark Post, de l’université de Maastricht, les start-ups positionnées sur le développement de viande de synthèse se sont multipliées. En 2015, Mark Post crée aux Pays-Bas la société Mosa Meat, suivie par SuperMeat en Israël, Upside Foods (ex-Memphis Meat) aux Etats-Unis et Integriculture au Japon. Aleph Farms (Israël), Higher Steaks (USA) et Eat Just (USA) amorcent le développement de viande in vitro en 2017.

A l’heure actuelle, une quarantaine de start-ups dans le monde travaillent sur le sujet.

A quand la mise sur le marché de la viande de synthèse ?

A Singapour, la SFA (Singapore Food Agency) a autorisé en décembre 2020 la commercialisation des nuggets de poulet de la startup californienne Eat Just. Ces nuggets sont désormais à la carte du restaurant singapourien 1880, mais sont encore loin d’être dans les rayons des supermarchés : les bioréacteurs de Eat Just sont au stade pilote (1200 L) – pas de quoi fournir les volumes nécessaires pour cibler la grande distribution.

Plusieurs acteurs construisent actuellement des installations à l’échelle semi-industrielle, qui leur permettront de mettre sur le marché des premières séries de produits en 2022 ou 2023, dans les pays où la règlementation le permettra. Après Singapour, les Etats-Unis ou Israël sont les pays les plus susceptibles de faire évoluer ce cadre règlementaire.

Il faudra aussi, pour envisager une mise sur le marché à grande échelle, lever plusieurs barrières technologiques :

  • Créer un milieu de culture à coût abordable et adapté à chaque type de cellules
  • Optimiser le design et la performance des bioréacteurs
  • Perfectionner les biomatériaux et les structures de soutien pour créer des pièces de viande de l’épaisseur souhaitée.
  • Enfin, la perception des consommateurs, bien que des études indiquent qu’elle soit globalement favorable, est susceptible de grandement varier selon les pays et les publics visés. Les fabricants ont encore du travail pour lever les réticences d’une partie du marché, et installer la viande in vitro dans nos assiettes.

En résumé, malgré les lancements annoncés comme imminents, nos rayons ne seront pas inondés de steaks de synthèse avant au moins plusieurs années.

3. La question du climat dans l’agriculture cellulaire : un point de controverse

Les bénéfices environnementaux sont au cœur de la proposition de valeur des start-ups qui développent de la viande de synthèse. A l’échelle industrielle, sa production nécessiterait en effet moins de terres agricoles, moins d’eau, et représenterait moins d’émissions de gaz à effet de serre que l’élevage.

Plus d’informations sur www.alcimed.com/

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