Actualité agro-alimentaire

Interview de Michael Roes, co-fondateur et CEO de Toopi Organics

Michael Roes, co-fondateur et CEO de Toopi Organics, pouvez-vous nous décrire votre parcours et votre société ?

Après l’obtention d’un Bac médico-social, je me suis orienté tout de suite vers le commerce, dans la rénovation énergétique des bâtiments. Après cette première expérience, j’ai monté une première société sur le même sujet puis j’ai été recruté par une start up bordelaise du digital en tant que responsable commercial ce qui m’a fait découvrir le monde des start up.

Je suis ensuite parti vivre à Londres et suis revenu en France quelques mois plus tard. J’ai alors décidé de ne plus travailler, du moins tant que je n’aurai pas trouvé une activité qui me passionne réellement. Vu que j’avais très peu d’argent, je me suis mis à produire mon alimentation et j’ai commencé à fabriquer mes propres engrais à base de plantes que je trouvais localement en me renseignant sur la bibliographie disponible sur internet et quelques livres dédiés.

Etant donné que j’étais très satisfait de mes rendements et que j’avais toujours trop de production, j’ai décidé d’aller vendre quelques bouteilles d’eau remplies de mes produits fertilisants sur des marché locaux. La demande était là et plusieurs agriculteurs et particuliers sont devenus des clients réguliers.

J’ai alors monté une auto entreprise qui s’est ensuite transformée en SAS (Mr Organics) avec l’augmentation du chiffre d’affaires et l’optimisation des procédés de production. Cette société a commencé à bien tourner, et pendant le développement j’ai pris connaissance des enjeux liés à l’urine humaine : pollution, possibilité de recyclage, coûts d’élimination. Ce sujet m’a passionné et j’ai cherché à comprendre pourquoi on ne recyclait pas l’urine alors qu’elle contient des éléments fertilisants et qu’elle pollue massivement le cycle de l’eau.

J’ai alors découvert qu’il s’agissait uniquement d’un problème économique (aucun procédé ne permettait d’arriver à des engrais moins chers que les engrais minéraux). Etant devenu spécialiste en produits fermentés pour l’agriculture, j’ai eu l’idée d’utiliser l’urine comme support pour faire croître des micro-organismes d’intérêt.

Après quelques essais empiriques, j’ai compris que l’urine pouvait être une excellente source de nutriments pour la croissance de ces bactéries et ai alors décidé de vendre très rapidement ma société (en 3 mois) afin de pouvoir me lancer à 100% sur le sujet de l’urine : Toopi Organics était née !

Selon vous, quels sont les futurs acteurs de l’innovation alimentaire en France ?

Je n’ai pas en tête de société spécifique qui deviendrait un acteur incontournable, en revanche je pense que certaines pistes ne sont pas/peu explorées et sont des clés pour assurer l’alimentation de demain, je peux en citer quelques unes :

Passer du compostage à une méthode plus conservative pour ramener de la matière non digérée au sol plutôt que d’amener un substrat quasi inerte. Le compostage c’est oublier que le sol est un organe de digestion bien plus efficace qu’une centrale de compostage et qu’environ 40% des matières mises à composter sont perdues sous forme de gaz. Il y a un facteur d’amélioration absolument énorme.

La conversion de biodéchets par des champignons qui est -selon moi- une bien meilleure voie de bioconversion que les insectes, car les champignons sont capables d’amener des protéines supplémentaires et non pas seulement les transformer.

La sélection variétale basée sur des facteurs épigénétiques qui permettent, sans modification génétique, d’avoir des plantes plus adaptées (sécheresse, rendement..). Donc en fait, revenir à une sélection plus locale et adaptée aux agrosystèmes locaux.

De façon générale, je pense que les sociétés qui parient sur des solutions résilientes et low energy (pas forcément low tech), sont plus à même d’avoir un impact significatif sur notre alimentation.

Je pense par ailleurs que les agriculteurs sont les mieux placés pour participer à ces changements, ils devraient pouvoir innover dans de bonnes conditions (ne serait-ce qu’en ayant le droit au CIR/CII par exemple).

Et pour finir, la robotisation a un bel avenir devant elle dans tous les secteurs de l’agro alimentaire.

Quels sont les facteurs clés de réussite d’une entreprise comme la votre ?

Vaste question, ça pourrait faire l’objet d’un livre !

Mais si je dois faire au plus court, je dirai que ce qui a été le plus déterminant est de ne jamais avoir eu comme objectif de faire de l’argent.

Se lever le matin avec la banane, s’entourer d’une équipe qui partage vos valeurs, avoir un objectif d’impact et surtout : profiter du voyage !

A titre personnel, quelle innovation alimentaire auriez-vous aimé inventer ?

J’aurai adoré découvrir la lacto-fermentation. De l’eau, du sel, un peu de temps et vous pouvez conserver des aliments plusieurs années, c’est absolument exceptionnel et sous exploité !

Plus d’informations sur www.toopi-organics.com

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