A la fin des années 90, le nombre de végétariens en France avait été estimé entre 0,5 et 2%. En 2012, ce nombre serait passé à 3% (1) et en 2017, à 5% (2).
A cette part de la population s’ajouterait 30% de flexitariens (3). Au total donc, plus d’un tiers de la population française aurait tendance à diminuer, voire arrêter, sa consommation de produits d’origine animale et tout particulièrement de viande.
Pas étonnant alors de voir de grandes marques s’intéresser au marché des produits végétaux : « Knacki Végétales » Herta, marque distributeur « Carrefour Veggie », rachat de WhiteWave et Alpro par Danone, les exemples sont nombreux.
Comment expliquer ce phénomène ?
A l’origine, ce phénomène est vraisemblablement causé par une sensibilisation des consommateurs aux impacts sanitaires, environnementaux et/ou éthiques liés à l’exploitation animale.
Cette sensibilisation passe par une meilleure information du grand public. En effet, les médias s’intéressent de plus en plus à ce sujet dont le caractère polémique garantit une certaine audience. Les réseaux sociaux sont également une source prolifique de contenu.
Par ailleurs, que l’information communiquée aille ou non dans le sens du végétarisme/végétalisme, voire du véganisme, elle suscite toujours de la curiosité et de l’émotion et ne passe jamais inaperçue.
En outre, le véganisme – et a fortiori ses déclinaisons plus tempérées que sont le végétarisme et le végétalisme – bénéficie d’un effet de mode venu des Etats-Unis où sa popularité est grandissante.
Avec elle, la demande en produits végétaux croît également. Il n’est pas surprenant donc de voir se démocratiser une offre de plus en plus variée.
Presque toutes les grandes surfaces proposent désormais des produits végétaux. Ils apparaissent sous des noms familiers pour le consommateur comme Herta ou Carrefour, les exemples mentionnés ci- dessus.
La facilité d’accès à ces produits favorise à son tour la demande puisqu’il devient plus simple de trouver des alternatives aux produits animaux. Comme souvent, la demande nourrit l’offre et inversement.
Pourquoi ce phénomène est-il voué à durer ?
D’un point de vue diététique, le végétarisme et le végétalisme sont des régimes alimentaires d’exclusion. Cependant, à la différence d’autres régimes alimentaires, leur point d’ancrage n’est pas la perte de poids.
La décision d’exclure les produits d’origine animale est généralement rationnelle et désintéressée. C’est un changement profond du mode de vie qui s’apparente plus à une philosophie qu’à un simple régime alimentaire.
De plus, les fondements de cette philosophie sont vertueux selon les valeurs de la société occidentale. Les détracteurs de ce mouvement s’attaquent bien souvent à ce qu’ils qualifient de « prosélytisme » ; c’est la volonté de diffuser, voire imposer cette philosophie qui les dérange.
Pour autant, les principes mêmes défendus par ce mouvement sont majoritairement compris et respectés. Contrairement au dernier « régime du moment », le véganisme et ses déclinaisons sont donc fondés sur des bases solides et durables.
L’enrichissement de la société qui permet cette démocratisation et la situation environnementale et économique présumée dans le futur portent à croire que leur ampleur n’ira qu’en augmentant. C’est pourquoi leur considération par l’industrie est non seulement souhaitable mais aussi opportuniste.
Comment l’industrie peut-elle tirer profit de cette situation ?
La particularité du marché des produits végétaux, c’est la place laissée à l’imagination et à la créativité des entreprises. L’innovation dans le secteur agroalimentaire traditionnel est limitée.
Les consommateurs ont leurs habitudes. Ils savent quels produits les intéressent. En revanche, en matière de produits végétaux, il y a un grand besoin d’innovation, parce que les consommateurs ne disposent pas du même éventail de produits.
Dans le domaine des alternatives végétales, réussir à créer un steak ou un fromage végétal aux propriétés organoleptiques (goût, flaveur, odeur) similaires à leurs équivalents animaux garantirait son succès. Proposer une alternative efficace à l’œuf dans les pâtisseries serait également très opportuniste.
Dans le domaine des produits originaux, proposer des biscuits sans beurre ni œuf, en réduisant au maximum le sucre et l’huile tout en conservant un goût gourmand et intéressant garantit de capter l’attention d’une partie de ces consommateurs.
Connaître le public visé est essentiel, comme toujours. Ici, le public a ses propres codes et valeurs auxquels il est très attaché. Son mode d’alimentation est un choix. Il sera très regardant et critique envers de nombreux produits, mais il recherche également les pépites du marché.
Ces pépites sont encore rares et peuvent toujours être améliorées. Le marché du végétal se développe très rapidement, mais il n’est pas trop tard pour prendre le train en marche.
Les connaissances traditionnelles de l’industrie qui reposent lourdement sur l’utilisation de produits d’origine animale sont moins pertinentes.
Il ne faut donc pas avoir peur de rechercher et d’innover, car la bonne idée, ce pourrait être vous qui la trouverez.
1 Résultats de l’enquête « Terra Eco / OpinionWay » sur le végétarisme en France
2 Résultats du sondage de l’institut « Harris Interactive »
3 Résultats d’une enquête conduite par la Direction Marketing de Herta
Actuellement étudiant dans le Master 2 de biologie « Alimentation, Droit, Nutrition, Santé » de l’Université de Brest, Basile est également titulaire du certificat « Plant-Based Nutrition » de l’université étasunienne Cornell. Il réalise un stage au sein de la division infantile de Danone Afrique, en affaires réglementaires. Il est très intéressé par les questions liées au comportement alimentaire.
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